Il est six heures

1
Il est six heures

Il est six heures ! Grenoble s’éveille. Et moi, dans le tram, j’ai la voix en sommeil… Direction : Centre Hospitalier et campus Universitaire. L’Hôpital serait-il plus universitaire que le Campus hospitalier ? Voilà une question à faire bailler. Mon voisin ronfle sur le siège d’à côté. Sa tête peu à peu sur mon épaule a un penchant pour glisser ? La fille de la dame en face fait ses dents et ça grince dans son portable qui ne mâche pas ses mots : la nounou n’est pas joignable ; et que dire de son mec qui n’est pas renté ? De sa grande qui veut déjà son portable ? De son gynéco qui est un dégénéré… toute la rame B est concernée. Le dos de mon siège au rythme du rap est ébranlé. Une mamy est rattrapée au vol qui a failli s’étaler ; par chance, un hockeyeur avec sa canne l’a renvoyée. L’arrêt « Victor Hugo » affiche le début de Félix Poulat : condamné à 2 ans de prison en 1870 pour avoir traité Napoléon III de « bandit couronné ». Il décèdera à 50 ans d’un accident de calèche au milieu de la ligne B. Tous les portables sont connectés ; sur le réseau ils sont branchés. Il est six heures : Grenoble s’éveille. Mon billet en sommeil. Six coups au clocher : j’entre à « St Louis ». Un moment pour me déconnecter. Faire silence sur le réseau. Ici les portables vont s’incliner. Sur la porte cette pancarte : « Il est possible qu’en entrant dans cette église vous entendiez l’appel de Dieu : par contre il est peu probable qu’il vous contacte par téléphone.» Il est six heures. Grenoble s’éveille et pour mon billet ce n’est pas encore demain la veille….

Photo : aigle de Steller, Extrême-Orient russe © Samuel Blanc

Poster un commentaire