Je me souviens très bien de son vélo, croulant sous le poids des paniers en osier. Constance (il faut que je précise que, par un miracle de la science généalogique qui m’a toujours échappée dans la famille, bien que je sois particulièrement attaché à mes racines), Constance était une cousine ; elle venait chaque semaine chez nous, jour de marché, déposer son vélo. Souvenir assez précis : était-ce pour ses confitures de groseilles et ses trompettes chanterelles sur un lit de mousse ? Ou la belle allure qu’elle avait sur sa bicyclette ?
Aujourd’hui, la cousine Constance me renvoie, par onomatopée, à une qualité qui se fait rare : la Constance !
Les gens inconstants sont particulièrement difficiles à supporter : d’humeur changeante et en plainte permanente.
Je préfère les gens qui durent, comme les objets, quitte à les retaper pour qu’elles durent encore ! Loin de l’obsolescence programmée de mon imprimante qui vient de décider subitement de ne plus reconnaître ses propres cartouches d’encre… Bref la constance ne paye plus.
Sauf que heureusement, la terre tourne, elle, et avec constance, m’emportant à la vitesse folle de 1670 kms à l’heure. Non seulement je ne ressens rien, mais sa constance même me maintient en vie. Et si jamais un jour, elle se laissait aller aux sirènes d’une légère inconstance ou d’un zeste commercial d’obsolescence programmée, en modifiant un brin sa vitesse… « Alors là j’vous dis pas » aurait dit la cousine Constance. En reprenant son vélo.

Photo : starique perroquet, détroit de Béring © Samuel Blanc