Doléances

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Doléances

Et si j’étais encore maire de mon village, aurais-je ouvert un cahier de doléances ? Peut-être ! Mais en page de garde, j’aurais écrit ceci  :
…… Chers administrés,
J’ai hésité avant d’ouvrir dans la maison commune ce cahier de doléances. Je ne peux vous garantir son efficacité, mais je m’engage à faire remonter vos propositions. Ce ne sera pas nouveau pour ces élus de terrain et de proximité que sont les maires ruraux : eux aussi sont rarement entendus, et jamais remerciés de ce qui fonctionne bien.
… Si vous êtes encore trop en colère au moment de prendre la plume…, revenez à un moment plus propice. La violence brouille l’écriture et rend inaudible la meilleure des propositions.
… Si vous faites votre liste de courses trop longue…, sachez que c’est vous qui passez à la caisse.
… Si vous êtes sceptique sur son utilité…, prouvez le contraire, vite, en vous intéressant à la chose publique que vous avez délaissée. Il faut reconnaître que depuis bien longtemps, on ne vous y a pas beaucoup aidé.
… Si vous pensez que ça ne sert à rien de s’exprimer…, vous n’avez pas forcément tort : on n’a pas toujours respecté vos votations.
… Si vous pensez que tout va bien… ne vous en prenez pas à ceux qui ont écrit quelque chose : l’injustice que vous ne voyez pas encore, vous atteindra peut-être bientôt.
… Si vous pensez que tout va mal… ne vous en prenez pas à ceux qui n’ont rien écrit : il y a tellement de petites choses formidables qui fonctionnent bien, acquises par les luttes de nos pères et mères, et dont nous pouvons librement profiter.
… Si vous ne savez pas quoi écrire pour la planète : ne tardez pas trop, et ne la laissez pas seule, s’en charger !
……. Aux plumes, citoyens !

Photo : Baie d’Andvord en Antarctique © Samuel Blanc

  1. Bravo Monsieur l’ex-Maire, bien écrit et c’est vrai que le Français est un rouspéteur à bon escient parfois, quant à la planète j’ai signé la pétition car arrêtons d’être des moutons. Cordialement à toi.

  2. « Fais de ta vie un rêve, et d’un rêve, une réalité. »
    (Antoine de Saint-Exupéry )
    Bien sûr, bien sûr cher Antoine …
    Mais n’est pas sage qui veut ! En ce qui me
    concerne ,j’ai bien du mal…beaucoup de mal !
    Je le regrette …
    Joli Billet Pierre.Merci.

  3. Beau billet Pierre…Quelques mots pleins de bon sens, valent mieux qu’un long discours sans consistance…et c’est là que commence les problèmes.
    la « langue de bois » Cette expression est récente en France puisqu’elle n’y est apparue qu’au cours des années 70.
    La langue de bois est un langage à part entière dont on se demande s’il n’est pas enseigné à l’ENA.
    A l’origine, ce sont les Russes qui, avant leur révolution, utilisent l’expression « langue de chêne » pour se moquer du style administratif employé dans leur bureaucratie tsariste étouffante.
    Ce langage est un outil qui confirme parfaitement ce qu’a cité Stendhal en le mettant dans la bouche d’un Jésuite, mais qui est généralement attribué à Talleyrand : « la parole a été donnée à l’homme pour cacher sa pensée ».

  4. Belle invitation à la réflexion, cher Pierre!
    Doléances, du latin « dolere »= souffrir. Oui que de souffrances, et même lointaines, devenues sourdes. On se rend compte qu’on ne peut en rester là. Il faudra déjà se mettre d’accord sur le constat, puis ensuite sur des solutions. Où se trouve le curseur du dénominateur commun? Bien malin celui qui peut le dire. Dur de laisser au placard sa colère, la parole toute faite, les préjugés ou présupposés…Et pourtant pour avancer il faudra pour tous un esprit d’écoute, d’ouverture, d’objectivité, de lucidité, de bienveillance -tout ce qui manque dans une expression de crise- une véritable envie de respect et vérité.

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