Lettre ouverte à mes locataires…

En ces moments difficiles, et pour le cas où vous l’auriez oublié, je veux vous assurer cher(e)s locataires de tout mon soutien. Prenez le mot au sens propre comme au figuré, puisque vous les distinguez.
J’ai cru comprendre que certains commentateurs -désormais plus contagieux que le virus- m’imputent l’apparition de ce dernier. Si j’en étais capable, encore faudrait-il que j’en aie l’audace… Celle qu’il vous a fallu par exemple pour larguer votre bombe sur Hiroshima, il y a 75 ans, déjà ! Petit rappel lointain pour ne pas trop vous vexer, d’autant que je ne voudrais pas gâcher votre dé-confinement récent. À ce propos, je ne suis pas certaine que le mot, inconnu à votre dictionnaire, soit l’opposé exact de confinement. Mais ce sont-là vos affaires.
J’ai reconnu cet humour ‘bien de chez vous’ avec votre « Attestation de Déplacement Dérogatoire ». J’ai même pensé un temps, moi aussi, à déroger à ma vitesse de rotation dans la galaxie. Vous savez, celle, vertigineuse mais dont la constance vous maintient en vie. Si je m’étais autorisée un ralentissement d’un petit millionième de mètre à la seconde, vous seriez tous « ad patres », et pour moins de 135 euros.
Rassurez-vous ! J’ai une patience à toute épreuve envers mes divers locataires, même si les bipèdes me sont plus difficiles à gérer que les plantes et les animaux. Jamais je ne vous demanderais de signer votre propre bon de sortie… Ce n’est pas l’envie qui m’en manque parfois, tant vous me fatiguez de vos impatiences orgueilleuses, vos caprices d’enfants gâtés, votre exploitation mercantile insensée de richesses gratuites.
Souhaitant que vous saurez saisir enfin cette occasion pour réfléchir et retrouver un peu de paix et de modestie, je vous adresse mes sentiments les plus planétaires.

Signé : La Planète

P.S. : pour le loyer, c’est toujours cadeau.

Photo : lagon au Kamtchatka © Samuel Blanc