Notre vieille Estafette bleue, aux couleurs de la Gendarmerie Nationale, est en panne à l’entrée d’un village de l’Eure. Surpris, à défaut d’être disciplinés, les conducteurs ralentissent et, s’apercevant que nous ne sommes pas de la grande maison, nous gratifient d’un coup d’accélérateur vengeur avec un sourire condescendant . La fumée blanche, dans le rétroviseur, nous avait pourtant prévenus qu’il allait se passer quelque chose. Les voyants, comme au ministère de l’économie, sont au rouge. Le comique de l’équipe, non content de nous avoir fait remarquer que nous sommes dans l’Eure, mais… en retard, montre le panneau portant le nom du village : « La Vacherie ».
Petit village sympathique que nous visiterons en attendant que le moteur refroidisse. Cinq cent soixante habitants : les Vacherois. Pas de vacherins. Pas de pompe à essence non plus. Panne sèche que n’explique pas la fumée blanche. Moral à hauteur du niveau d’huile : au plus bas… Une vraie vacherie.
Vacherie parfois aux allures de méchanceté, de crasse, ou même de malveillance… Petites vacheries de la vie comme autant de fautes-à-pas-de-chance : erreur de carburant à la pompe pourtant signalée par le pistolet ; pied dans la seule crotte sur le trottoir sous le regard goguenard du chien ; clic sur «supprimer» pour «enregistrer» ; et un P.V. sous l’essuie-glace…Une vacherie.
Placide, les yeux bleus, la langue bien pendue qui ne dit jamais du mal de ses voisins, attentionnée aux trains… la vache, vous le savez, est mon animal préféré. S’il est vrai qu’il ne vient à personne l’idée d’écrire -sauf à en commettre une belle- que l’ânerie est la maison de l’âne…, la vacherie, elle, en bon français, est bel et bien le lieu de l’étable où crèche la vache…
Ça ! c’est une vraie vacherie. Non, mais.

Aquarelle réalisée par Julie Villard.